Ce centre est tenu par les Filles de la Charité de Saint Vincent de Paul. Sœur Téodora nous accueille avec joie. Son dynamisme nous touche.
Visites
Nous visitons la léproserie, créée en 1902. En pratique, il n’y a quasiment pas de lépreux en ce moment, car les maisonnettes sont en cours de réfection. D’habitude, il y a 60 lépreux sur ce site. Le médecin, Jean Paul, est chargé de faire le dépistage précoce de la maladie. Il nous explique que les premiers signes de la maladie sont l’apparition de taches claires sur la peau, qui devient insensible à cet endroit. La difficulté est de bien faire la différence entre les mycoses et la lèpre. Si le patient ne reçoit pas de traitement à temps, la bactérie va atteindre ses terminaisons nerveuses, et il ne sentira plus ses doigts ni ses pieds. Le médecin part régulièrement en tournée dans les villages pour décrire les premiers signes. Prise à temps, cette maladie se soigne et le malade guérit. La Fondation Raoul Follereau a longtemps aidé la léproserie, a fourni 2 véhicules pour les tournées en brousse, mais les subventions diminuent nettement. Il y a 4 500 consultations relatives à la lèpre par an.
Situation actuelle
49 personnes travaillent au centre : 2 médecins, 1 anesthésiste, 1 nutritionniste, 5 infirmières, 2 sages-femmes, 5 aides-soignantes, 2 pharmaciennes, 2 laborantins, 4 ménagères, 3 cuisinières, 1 chauffeur, 3 agents d’entretien, 4 gardiens, 12 enseignants, 2 jardiniers.
Le RES collabore avec PHI (Pharmacie Humanitaire International) qui facture des médicaments à des prix « humanitaires ». La Fondation Deerfield, issue d’un groupe pharmaceutique, finance l’équivalent de 50K$ de médicaments répartis dans 33 centres à Madagascar, toutes congrégations confondues. Les médicaments sont acheminés gratuitement par Aviation Sans Frontière depuis Orly jusqu’à Tananarive. Chaque centre doit fournir tous les justificatifs pour obtenir l’agrément qui permet ensuite de recevoir les médicaments et d’échapper aux droits de douanes. Chaque dispensaire commande les médicaments qui ne s’achètent pas localement ou bien coûtent beaucoup trop chers en pharmacie. Ceux qui sont vendus en flacons ou pèsent trop lourds sont écartés. La livraison a lieu une fois par an à Tananarive. Les sœurs s’organisent ensuite pour récupérer les colis à leur maison mère située à la capitale et les dispatchent dans les différents centres au gré de leurs allées-venues.
Sœur Teodora qui est responsable du centre médico-chirurgical et infirmière diplômée présente fièrement l’agrément gouvernemental obtenu le 19/02/2018, après des mois de procédure, avec l’aide de sœur Lucie (environ 400 heures de travail et de déplacements). Sœur Lucie actualise le cahier des charges de PHI : liste du personnel, de l’équipement et des besoins en médicaments par rapport à l’année dernière. Sœur Téodora certifie que les médicaments ne seront pas revendus. Il y a 40 lits d’adultes et 12 lits d’enfants au centre médico-chirurgical. On compte en moyenne 12 accouchements et 600 consultations par mois.
Le centre compte 5 sœurs en plus de sœur Teodora, sœur Jacqueline, infirmière également, responsable de la distribution de lait et de médicaments, sœur Lucie aide-soignante, sœur Virginie, responsable du matériel scolaire, sœur Madeleine, responsable de l’internat et de l’école ménagère, sœur Marie-Louise, responsable du potager.
160 personnes atteintes de tuberculose sont suivies régulièrement et viennent prendre leur traitement quotidien au centre. 50% des familles n’ont pas de quoi payer le traitement, qui dure de 2 à 6 mois. Alors les sœurs fabriquent des petits pains qui sont vendus et cela compense le manque à gagner. Quelle ingéniosité !
Il n’y aura bientôt plus de lait, surtout du 1er âge. Le décompte de lait est précis ; tout est consigné sur un cahier et François reporte les données sur le fichier Excel du RES. Il reste 24 cartons de lait entier (qui est distribué aux nourrissons et aux tuberculeux) et 9 cartons de lait ½ écrémé, qui est donné aux mamans qui allaitent. Le lait en poudre est dilué dans de l’eau bouillante et servi sur place, pour éviter qu’il ne soit revendu. Les sœurs en consomment aussi un peu sous forme de yaourts, pour rester en forme et poursuivre leurs nombreuses missions.
Sœur Teodora nquitte la maison en juillet, pour une autre destination. L’inquiétude se lit sur son visage.
Projets
- Un puits pour le potager (400€ environ), qui pourra ensuite être agrandi
- Des repas pour les lépreux
Nous visitons avec sœur Teodora le centre médico-chirurgical, qui est particulièrement propre et bien équipé : salle d’attente, salle des urgences, salles de consultation de médecine et de gynécologie (une lueur de fierté se lit dans ses yeux quand elle nous montre l’appareil d’échographie), salle de soins, pharmacie, bloc opératoire et salle de radiologie. La fondation Alexandre POUSSIN a récemment fait un don de 30 000€ qui a permis d’acheter les appareils de radiologie. Le radiologue nous montre la radio des poumons d’une femme atteinte de tuberculose : les taches blanches révèlent la maladie.
Nous nous levons à 6h45 pour le petit déjeuner joyeux à 7h avec les sœurs. Les sœurs Teodora, Marie-Louise et Madeleine restent avec nous pour nous faire visiter le site.
Le lendemain, nous débutons la journée par la prière du matin avec la douzaine de journaliers dans un coin du jardin potager. Nous sommes heureux de partager cet instant de prière avec eux et d’offrir notre journée au Seigneur.
Ensuite sœur Marie-Louise nous fait fièrement visiter son jardin potager. Et il y a de quoi ! Il s’agit d’un grand potager avec des carrés de manioc, caféiers, papayers, vanille, légumes etc… Il nourrit la communauté pour une partie de l’année. 2 hommes l’aident dans son travail.
Puis nous assistons à la distribution de médicaments pour les tuberculeux convalescents : chacun tend une carte rose à la pharmacienne sur laquelle sont consignés les dates de prise de médicament (3 cachets par jour pendant 3 à 6 mois), et l’évolution du poids de chacun.
Vient ensuite le moment de la distribution de lait pour les tuberculeux, les salariés et les journaliers. Nous commençons à revoir des visages connus. Isabelle prend le bébé d’une jeune femme dans ses bras.
Nous nous rendons ensuite à la léproserie avec sœur Téodora et rencontrons 2 malades. L’un est quasiment guéri et déplie aisément les doigts de sa main, l’autre en revanche a ses doigts tout repliés, comme s’ils étaient paralysés. Sœur Téodora lui montre comment faire des exercices d’assouplissement afin de retrouver un peu de mobilité. Sœur Téodora nous explique qu’à son arrivée, le personnel ne voulait pas vivre si près des lépreux, par peur de contagion. Mais elle les a rassurés ; comme ils sont bien nourris et en bonne santé, ils ne craignent rien.
Nous nous rendons ensuite dans le territoire de sœur Madeleine qui nous fait visiter son jardin potager, entretenu par les 25 élèves de l’internat. Elle leur a dit de faire pousser un plante qui sert dans la lutte contre le cancer. Puis elle nous fait visiter son école ménagère (apprentissage des règles d’hygiène, cours de couture et de broderie). Une vingtaine de jeunes filles de 14 à 17 ans, vêtues de belles robes colorées cousues de leurs propres mains, s’activent autour des patrons qu’elles doivent recopier. Nous repérons 2 machines à coudre manuelles de la marque Singer comme celles de nos grands-mères. Une élève prend les mesures d’Isabelle pour lui confectionner une robe. Une machine à coudre coûte environ 400.000 ayas, c’est-à-dire 100€ ou 100 jours de salaire. Sœur Madeleine nous explique qu’une fois formées, les filles repartent dans leur village, mais n’ont pas le matériel nécessaire pour exercer leur métier de couturière. Nous nous disons avec François que ce serait bien d’imaginer une trousse de couturière qui serait donnée avec le diplôme. Peut-être aussi avec une ou deux commandes pour débuter et un acompte pour acheter le tissu.
Nous avons déjà rencontré cette problématique en visitant l’atelier de formation à la menuiserie de Manakara. Là également, les jeunes partent sans matériel pour exercer leur métier ; sans doute qu’une petite caisse à outils contenant marteau, clous, vis, tourne vis, scie, vrille, serait une idée à explorer.
Dans les deux cas, il conviendra de prévoir une obligation de revenir au centre 1 an après, afin de s’assurer que le matériel n’a pas été simplement revendu. Sœur Madeleine nous explique également la problématique de la fripe. La fripe, ce sont des vêtements d’occasion arrivés d’Europe qui inondent les places de marché. Cette marchandise, gratuite au départ avant le jeu des revendeurs, concurrence déloyalement les textiles locaux qui eux, ont bel et bien un coût de fabrication, empêchant ainsi tout développement de l’activité locale. C’est l’exemple typique de la « fausse bonne idée ». De fait, la plupart des gens que nous croisons portent des T-Shirts « Nike » ou « Fly Emirates » et non des chemises typiquement malgaches. Quel dommage !
Nous rejoignons la petite maison que nous prêtent les sœurs le temps de notre séjour. Elle jouxte l’école et nous arrivons juste au moment de la sortie. Nous décidons de jouer avec les enfants de la maternelle à « 1 2 3 soleil ». Ils sont hilares et leurs cris de joie nous réjouissent. Nous reconnaissons quelques parents qui sont salariés du Centre.
Puis nous assistons aux vêpres à 18h, prions avec les sœurs et racontons notre virée à Manombondro pendant le diner, très animé et très gai comme d’habitude. D’ailleurs, si un mot pouvait résumer notre voyage, ce serait la joie, et pas la misère. Avec les sœurs, nous sommes au service des plus pauvres, des plus vulnérables, le cœur plein d’espérance, les yeux tournés vers Dieu, qui œuvre à nos côtés. L’enfant qui n’a rien dans le ventre, mal habillé et tout sale et qui pourtant nous sourit jusqu’aux oreilles, la vielle femme décharnée dont le regard s’illumine au passage des sœurs, c’est Dieu qui se rend visible ici-bas et nous invite à l’humilité, à la compassion.
Nous offrons aux sœurs une belle icone et elles nous couvrent de cadeaux : une robe pour Isabelle, cousue par les élèves de sœur Madeleine et une belle chemise très colorée pour Pierre. Yves notre chauffeur nous prend tous en photo. Sœur Jacqueline nous offre également, ainsi qu’à Yves, un beau polo aux couleurs du Centre Saint Vincent de Paul. Les sœurs insistent pour savoir si nous reviendrons l’année prochaine : nous annonçons notre retour pour la mi-mars 2020. Nous leur demandons ce qui leur ferait plaisir, et que nous pourrions mettre dans nos valises la fois prochaine : elles suggèrent du fromage, du jambon et du saucisson sous vide.
Après le dîner, nous chantons jusqu’à 21h (heure bien tardive !) et apprenons aux sœurs des chants de la Communauté du Chemin Neuf. Sœur Madeleine nous enregistre sur son téléphone. Nous leur laissons les paroles, elles pourront ainsi renouveler leur répertoire.
Le lendemain, nous participons à la rentrée des classes des tous petits avec sœur virginie. Ils nous chantent les chansons de notre enfance : « gentille alouette ». Ils nous offrent même des petits chapeaux typiques de la région.
Le lendemain, dès 8h30, nous quittons le Centre d’Ambatoabo : nous embrassons les sœurs avec émotion, puis nous nous séparons à regret, après une dernière photo revêtus de nos beaux polos. Il est temps de regagner Tananarive : le voyage va durer 2 jours !