Retour à Madagascar – la pauvreté est grandissante

Chers amis(es)

Me voici à nouveau à Madagascar pour un séjour de deux mois. En continuels déplacements dans une grande partie de l’île (la 5ème plus grande au monde), le temps passe agréablement vite. Les malgaches sont sympathiques et accueillants malgré leur grande pauvreté (90% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté fixé à 1.5€/jour). Cette misère, alliée au chômage massif des jeunes particulièrement, est fâcheusement le terreau de vols et de violence en recrudescence.

Voici le résumé de quelques visites de Communautés que j’ai le privilège de rencontrer régulièrement sous l’égide du RES, « Réseaux des Entrepreneurs Solidaires » (www.entrepreneurs-solidaires.ch).

Comme dans toutes les Communautés, les religieuses de Farafangana Sacré Cœur s’occupent des pauvres venant frapper à leur porte. Ce n’est pas rare de payer les frais d’hospitalisation de malades démunis de tout, précise Sœur Odile. Sans argent, tu ne rentres pas dans un hôpital public. On a coupé le pied à un éleveur après lui avoir volé son troupeau. Cet homme a aujourd’hui tout perdu et se retrouve gravement blessé, sans argent. Heureusement pour lui, les Sœurs sont à ses côtés pour le soulager psychologiquement et financièrement. D’autres éleveurs et propriétaires fonciers, victimes de vols de leur troupeau et blessés, sont dans l’obligation de vendre leurs terres pour payer les frais d’hospitalisation. Ils ont tout perdu et certains quittent leur village pour aller grossir les rangs des démunis en ville. Ces violences et ces vols inacceptables, quelques fois perpétrés de connivence avec l’armée ou la police, ont non seulement des conséquences dramatiques pour les familles victimes, mais la rareté du lait local s’accentue encore en parallèle avec la disparition des attelages.

Le Centre d’Ambohigogo, situé à 34 km à l’ouest de Farafangana, est relié à cette ville par une piste en terre par endroit défoncée. Le dispensaire de la Communauté, dans ce petit village retiré, est très apprécié de la population régionale. De petites cases permettent l’hospitalisation de certains patients faibles et nécessitant un suivi médical. Les tuberculeux logent également dans une maison en bois proche du dispensaire durant leur traitement. Le confort y est par contre rudimentaire. Une simple natte sépare les planches des lits aux malades décharnés. Un devis pour l’achat de matelas est en préparation.

Moteur pétaradant et polluant, c’est toujours un moment particulier de se rendre à Tangainony en canot. L’alimentation du moteur en gasoil s’effectue par un tuyau bricolé relié à un jerrican pendu au plafond de l’embarcation alors que le refroidissement de l’engin est assuré par l’eau puisée dans le fleuve. Un jeune adolescent rempli régulièrement un autre bidon suspendu en dessus de la mécanique. Six litres d’eau /minute sont nécessaires pour garantir le bon fonctionnement du tout, ce qui représente environ 1’000 litres au terme de l’épopée de deux heure quarante cinq minutes.

La pauvreté est ici grandissante, m’explique Sœur Jacqueline, infirmière. Les femmes enceintes n’ont pas l’argent pour accoucher à l’hôpital et mettent au monde leur enfant à domicile. Dès qu’un problème survient, c’est souvent le drame et la maman laisse sa famille orpheline. Aujourd’hui, le dispensaire de la Communauté accueille 55 orphelins. Les médicaments de « Pharmacie Humanitaire Internationale » envoyés par RES sont d’un grand secours et Sœur Jacqueline me prie de transmettre ses remerciements à tous les acteurs de ces précieux dons.

Ce lundi de Pâques, les moteurs des canots font silence. C’est en pirogue que je regagne Farafangana. Il est 04.00 h., le ciel est étoilé avec une pleine lune, la pirogue glisse sur l’eau aux chants des oiseaux. L’air pur, le calme, la nature verdoyante, quoi de plus reposant ?

Au plaisir

François

 

PS : la poudre de lait suisse, gérée dans les pays destinataires par notre association et d’autres ONG, a sauvé des dizaines de milliers d’enfants et de malades depuis plus de cinquante ans. Malheureusement, notre gouvernement a décidé de stopper cette aide, de grande réputation internationale, en 2019. L’équivalent en valeur de ce précieux lait sera versé au PAM (Programme alimentaire Mondiale), grand organisme dont les frais généraux sont colossaux. RES ainsi que d’autres institutions d’entraide travaillent bénévolement. Comment comprendre une telle décision qui mettra en péril la vie de milliers d’innocents ?

Farafangana-tangainony-pont imposant démuni de ses barrières

Farafangana-tangainony-pont imposant démuni de ses barrières

Farafangana-transport de viande bio

Farafangana-transport de viande bio

Farafangana-tangainony-la machinerie du canot

Farafangana-tangainony-la machinerie du canot

 

farafangana-tangainony-les occupants du canot

farafangana-tangainony-les occupants du canot

Ambohigogo-un lit d'un tuberculeux

Ambohigogo-un lit d’un tuberculeux

ambohigogo-la maison des tuberculeux

ambohigogo-la maison des tuberculeux

Faraf.-Ambatoabo-distribution de riz aux pauvres

Faraf.-Ambatoabo-distribution de riz aux pauvres